PRÉPARATION




  • Le dispositif : voyager léger. 
Je suis généralement plutôt sceptique quant au développement de la technologie dans tous les pans de notre société : les écrans qui se substituent aux livres, les jeux vidéos qui remplacent la construction de cabanes, la géolocalisation qui supplante la représentation sur une carte, la rapidité du micro-onde au détriment du temps passé à faire de la bonne cuisine ...
Bref comme dirait Alain Damasio, écrivain de Sciences Fiction : en ce qui concerne le progrès technologique il faut toujours garder à l'esprit ce que l'on y gagne et ce que l'on y perd.
En ce qui concerne le cinéaste, il gagne en coût, en qualité, en miniaturisation donc en poids. Il y a à peine dix ans, je n'aurais jamais pu me payer ni transporter un tel matériel professionnel de tournage dans un simple sac à dos.
Ce que j'y perds ? La joie de me trimbaler une Bolex mécanique de dix kilos et des centaines de mètres de pellicule argentique qu'on développe en rentrant pendant des jours et dont on est jamais certain qu'elle n'a pas été sous exposée ou voilée par les rayons X à l'aéroport ... Donc cette fois-ci je ne vais pas cracher dans la soupe.
J'admets seulement être l'adepte du culte de la fée Électricité, plutôt que du génie Chimie (j'emporte quand même un petit Minox 35mm).




  • Le sujet : compléter des études universitaires lacunaires.
Dans les rangs des amphis des facultés, Rousseau et Meirieu sont à peine abordés. Quant à Ferrer, Freinet, Neill, Montessori, Decroly, ils sont carrément oubliés !
On ne faisait que préparer les examens, rester conformes aux instructions officielles, devenir des bêtes de concours, une tête bien pleine à défaut d'une tête bien faite.
La vrai question est la suivante : pourquoi les pédagogies dites "nouvelles" dans les années 30 sont-elles toujours si peu répandues ?
Lors de mes études on me disait qu'il fallait commencer par connaître la didactique et maîtriser les savoirs pour être un bon enseignant. Je me demande si l'on ne devrait pas commencer par comprendre ce qu'est la pédagogie avant de savoir si on veut vraiment devenir un bon enseignant. En réalité, une bonne partie des professeurs ne connait pas l'Histoire de leur profession. Nombreux sont ceux qui envisagent leur métier de fonctionnaire comme un service en réponse à des directives étatiques chiffrées, des méthodes limitées et des objectifs parfois contradictoires.
Les gestes professionnels à adopter visaient en priorité la manière dont exercer une autorité "bienveillante" afin de "gérer" la classe. Mais quel paradoxe que de demander à un prof débutant de mobiliser ses élèves avant de lui permettre de chercher comment les intéresser.
Chers jeunes étudiants, je vous conseille vivement de lire ces auteurs. Leurs principes seront vos fondations, leurs luttes feront votre dynamisme, leurs démarches stimuleront vos réflexions. Faites-le pendant qu'il en est encore temps, car bientôt vous serez submergé par le corporatisme qui chaque jour vous découragera de laisser cette bouée de sauvetage qu'est la routine et d'apprendre à nager seul afin d'explorer ce monde merveilleux que sont les Sciences de l'éducation.
Ne l'oubliez pas, vous êtes des chercheurs. Vous avez choisi un métier qui ne se résume pas à une vingtaine d'heures passées en classe. Le reste de votre temps vous l'occuperez à lire, regarder des documentaires, assister à des conférences, visiter des musées, faire du bénévolat... Vous avez choisi de rester à l'école, vous devez savoir que vous aurez des devoirs toute votre vie, autant que ce soit un plaisir ;-)




  • Le questionnement : inciter l'introspection sans susciter la méfiance.
Franchement, je comprends les enseignants qui ne veulent pas qu'on les interviewe et encore moins qu'on les filme dans leurs classes.
Chaque enseignant doit savoir se mettre en scène, c'est évident. Mais sa profession n'est pas comédien. Il occupe un rôle, porte un costume mais il enseigne selon sa propre personnalité. Il reste fondamentalement lui-même. Il a déjà beaucoup à faire avec son auditoire, qui n'est certes composé que d'enfants mais qui peuvent être durs quand l'adulte en face d'eux n'est pas à l'aise. Cependant ils ne jugent pas le cours comme des spectateurs jugeraient la qualité d'un spectacle. Les enfants sont généralement bon public et leur condition ne se limite pas à celle d'observateur. Ils doivent être aussi, dans l'idéal, les acteurs de leurs propres apprentissages. Ils font preuve d'empathie lorsqu'ils ressentent eux-aussi une certaine pression due au regard des autres et surtout ils trouvent rapidement un intérêt personnel à ce que la pièce fonctionne.
Cependant un bon enseignant, même excellent, peut perdre tous ses moyens quand l'Inspecteur vient dans sa classe. Car ce n'est jamais envisagé comme une visite de courtoisie. Les enseignants sont pour la plupart anxieux à l'idée d'être observés, analysés voire même jugés ponctuellement par un supérieur hiérarchique.
Alors imaginez le nombre d'enseignants qui accepteraient que leur travail et leurs opinions soient enregistrés, examinés, découpés, puis montrés librement sur internet.
Je risque de n'avoir comme candidats que des théoriciens et des chercheurs expérimentés qui risquent de m'énoncer et justifier leurs conceptions pédagogiques. Et ce n'est pas l'unique objectif. Il existe déjà de nombreux documentaires qui énumèrent et tentent de vulgariser les diverses pédagogies constructivistes. Certes il est essentiel de comprendre les raisons de la réussite de certains enseignants mais il est aussi nécessaire de se questionner sur les causes des défaillances d'un système.
Alors comment faire ? Quel dispositif mettre en place pour faire d'une interview une discussion structurée tout en laissant place à une forme de liberté de parole, d'authenticité relationnelle entre deux personnes aux statuts égaux et à la légitimité réciproque.
Je veux aussi que les interviews soient un bon moment partagé, qu'il y ait un caractère ludique à essayer, ensemble, de répondre à des questions qu'on s'est tous posées quand on exerce ce métier.
 Alors j'ai pensé à une chose tout à fait innocente et conviviale et comme qui dirait "pédagogique" : une partie de jeu de société.
Je me suis donc mis en tête d'en fabriquer un. 
 


  • Le départ : c'est pas trop tôt !

Mon hémisphère gauche déblatère : tu n'as pas été assez rigoureux. Tu n'avais pas prévu le temps que ça prendrait d'envoyer autant de mails. Tu aurais dû prévoir de filmer dès la rentrée des classes. Au lieu de ça tu as perdu presque un mois dans tes préparatifs ! Ça a pris trop de temps de bricoler ce van mais comme tu vas passer du temps à l'intérieur, autant que ce soit pratique et confortable... Bon et le blog, c'est pour quand ? Et les billets d'avions, les prix montent. Les visas, les vaccins ? Ne tombe pas dans l'oisiveté ! Vu le nombre de pays que tu dois visiter tu ferais bien de t'y mettre plus sérieusement. Tu vas pas perdre un an de salaire pour prolonger tes vacances ! T'y vas pas en touriste mais en mission fiston ! Faut voir les choses en grand ! Allez, allez ! Checking list : what I have, what I need, what I pack.

Mon hémisphère droit (et mes amis) en revanche me rassure : de toute manière il fallait perdre ce temps pour en gagner plus tard. Tu as été suffisamment organisé, qui plus est, les établissements ont autre chose à faire en début d'année, tu es bien placé pour le savoir. Et puis tu n'en as (Épicure)rien à faire de la destination, c'est le cheminement qui compte. Vas donc profiter de tes montagnes qui t'ont tant manqué à Paris. Une année sabbatique c'est aussi fait pour se ressourcer. Ne sois pas trop dur avec toi-même et ne cherche pas à tout prévoir ou contrôler. Laisse place à l'intuition, les meilleurs rencontres sont souvent celles que l'on fait par hasard.

Au fil des voies d'escalade et des randonnées une citation m'est revenue : "la grandeur ne naît pas lorsque tout semble vous sourire. La grandeur ne peut naître que lorsqu'on a été mis à l'épreuve, lorsqu'on a pris des coups et souffert des désillusions. Oui ! C'est seulement lorsqu'on a peiné tout au fond de la vallée que l'on pourra comprendre quel miracle c'est de découvrir la beauté de la haute montagne ..."



Parc National des Ecrins/ La Barre des Ecrins vue du Vieux Chaillol


 Le Dévoluy/ Le Grand Ferrand vue de l'Obiou

 L'Obiou

 La falaise de Ceüse

La vallée du Gapençais

Soleil couchant sur la vallée du Buëch

 Tiens il a neigé. Il est temps de décoller.